Niépce correspondance et papiers
N IEPCE 1129 excitent. Et ce n’est même là encore qu’un énoncé abrégé du phénomène, par lequel on désigne seulement ses phases principalement appréciables ; car il y a réellement dans le spectre total une succession infinie de nuances, qui passent par degrés insensibles de l’ex- trême rouge au violet extrême. Or, en plaçant, non plus l’œil, mais des produits impres- sionnables par la lumière, ou même des thermomètres très-sensibles, dans ces diverses par- ties du rayon total, on trouve qu’ils y sont affectés fort diversement. Par exemple, le thermomètre accuse ainsi des impressions calorifiques, opérées vers l’extrémité rouge du spectre, et qui, de là s’affaiblissent progressivement jusqu’à devenir nulles ou à peine sen- sibles vers l’extrémité violette. Le chlorure d’argent au contraire, est affecté et noirci quand on l’expose aux rayons violets, tandis que les rayons rouges ne le changent point. Même, en poursuivant ces expériences, on a découvert que le plus grand effet calorifique n’a pas lieu dans le rouge visible mais au delà, en dehors du spectre lumineux, ce qui prouve l’exis- tence de rayons spécialement calorifiques, moins réfrangibles que tous les rayons lumi- neux, et d’autres plus réfrangibles que les précédents, quoique calorifiques, qui restent compris dans la partie lumineuse du spectre. On a reconnu semblablement, que ce n’est pas dans le violet extrême, mais au delà, et hors de cette partie du spectre visible, que le chlo- rure d’argent est le plus vivement affecté ; de sorte qu’il y a aussi de ce côté des rayons invi- sibles, plus réfrangibles que le violet extrême, lesquels sont les plus efficaces pour impres- sionner cette substance, quoiqu’ils soient inefficaces sur notre rétine pour y exciter la vision. Des expériences postérieures, faites avec des instruments thermoscopiques infini- ment plus délicats que le thermomètre ordinaire, ont achevé de préciser ces notions, quant aux rayons calorifiques, en montrant que leur existence est physiquement distincte et indé- pendante, des rayons qui excitent en nous la sensation de lumière ; qu’ils peuvent être com- plétement séparés de ceux-ci, comme ceux-ci peuvent en être isolés ; de sorte que l’on peut obtenir également de la chaleur sans lumière ou de la lumière sans chaleur sensible 1 . Il res- tait à faire des études analogues sur les parties spéciales de la radiation, soit solaire soit dif- fuse, qui déterminent des effets chimiques, ou qui rendent certains corps phosphoriques lorsqu’ils y ont été quelque temps exposés. Les résultats si étonnants de M. Daguerre sont venus donner un intérêt pressant à cette recherche, et fournir même des éléments d’expé- riences qui manquaient pour la tenter ; soit par la communication libérale de plusieurs effets qu’il avait observés lui-même avec d’autres vues, soit en nous indiquant de nouvelles préparations très-impressionnables qu’il avait formées, et qu’il avait abandonnées comme n’étant pas applicables à son but, quoiqu’elles le fussent au nôtre. Alors, en rassemblant toutes ces indications, et distinguant les différences spécifiques d’actions qu’elles décèlent, on s’est trouvé conduit à considérer généralement les radiations émanées des corps maté- riels, célestes ou terrestres, comme composées essentiellement d’une infinité de rayons ayant des qualités et des vitesses diverses, susceptibles d’être émis, absorbés, réfléchis, réfractés, et qui, selon leurs qualités propres, parmi lesquelles il faut comprendre leur nature et leur vitesse actuelles, peuvent produire la vision, la chaleur, la phosphorescence, déterminer certains phénomènes chimiques, et probablement exercer en outre sur les matières inertes, comme sur les corps vivants, beaucoup d’autres actions qui nous sont encore inconnues, lorsqu’ils sont reçus par des corps ou par des organes sensibles à leurs impressions. Cette idée générale est tout à fait indépendante de la nature physique des radiations en elles-mêmes. Si on les exprime ici par des caractères de matérialité, c’est 1. Note de Biot : « Voyez la série des travaux de M. Melloni ». 610 1833 1839
RkJQdWJsaXNoZXIy NDY2MA==