Niépce correspondance et papiers

1210 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS quelques minutes on exécutera un des travaux les plus longs, les plus minutieux, les plus délicats de l’as- tronomie. Une branche importante des sciences d’observation et de calcul, celle qui traite de l’intensité de la lumière, la photométrie , a fait jusqu’ici peu de progrès. Le physicien arrive assez bien à déterminer les intensités comparatives de deux lumières voisines l’une de l’autre et qu’il aperçoit simultanément ; mais on n’a que des moyens imparfaits d’effectuer cette comparaison, quand la condition de simultanéité n’existe pas ; quand il faut opérer sur une lumière visible à présent, et une lumière qui ne sera visible qu’après et lorsque la première aura disparu. Les lumières artificielles de comparaison auxquelles, dans le cas dont nous venons de parler, l’ob- servateur est réduit à avoir recours, sont rarement douées de la permanence, de la fixité désirables ; rare- ment, et surtout quand il s’agit des astres, nos lumières artificielles ont la blancheur nécessaire. C’est pour cela qu’il y a de fort grandes différences entre les déterminations des intensités comparatives du soleil et de la lune, du soleil et des étoiles, données par des savants également habiles ; c’est pour cela que les conséquences sublimes qui résultent de ces dernières comparaisons, relativement à l’humble place que notre soleil doit occuper parmi les milliards de soleils dont le firmament est parsemé, sont encore entou- rées d’une certaine réserve, même dans les ouvrages des auteurs les moins timides. N’hésitons pas à le dire, les réactifs découverts par M. Daguerre hâteront les progrès d’une des sciences qui honorent le plus l’esprit humain. Avec leur secours, le physicien pourra procéder, désormais, par voie d’intensités absolues : il comparera les lumières par leurs effets. S’il y trouve de l’utilité, le même tableau lui donnera des empreintes des rayons éblouissants du soleil, des rayons trois cent mille fois plus faibles de la lune, des rayons des étoiles. Ces empreintes, il les égalisera, soit en affaiblissant les plus fortes lumières, à l’aide de moyens excellents, résultat des découvertes récentes, mais dont l’indication serait ici déplacée, soit en ne laissant agir les rayons les plus brillants que pendant une seconde, par exemple, et continuant au besoin l’action des autres jusqu’à une demi-heure. Au reste, quand des observateurs appli- quent un nouvel instrument à l’étude de la nature, ce qu’ils en ont espéré est toujours peu de chose rela- tivement à la succession de découvertes dont l’instrument devient l’origine. En ce genre, c’est sur l’ im- prévu qu’on doit particulièrement compter (I) (I) Note : Voici une application dont le Daguerréotype sera susceptible et qui me semble très digne d’intérêt : L’observation a montré que le spectre solaire n’est pas continu, qu’il y existe des solutions de continuité transversales, des raies entièrement noires. Y a-t-il des solutions de conti- nuité pareilles dans les rayons obscurs qui paraissent produire les effets photogéniques ? S’il y en a, correspondent-elles aux raies noires du spectre lumineux ? Puisque plusieurs des raies transversales du spectre sont visibles à l’œil nu, ou quand elles se peignent sur la rétine sans amplification aucune, le problème que je viens de poser sera aisément résolu. On fera une sorte d’œil artificiel en plaçant une lentille entre le prisme et l’écran où tombera le spectre, et l’on cherchera ensuite, fût-ce même à l’aide d’une loupe, la place des raies noires de l’image photogénique, par rapport aux raies noires du spectre lumineux. Cette pensée semble-t-elle paradoxale ? Quelques citations en montrent la justesse. Des enfants attachent fortuitement deux verres lenticulaires de différents foyers, aux deux bouts d’un tube. Ils créent ainsi un instrument qui grossit les objets éloignés, qui les représente comme s’ils s’étaient rapprochés. Les observateurs s’en emparent avec la seule, avec la modeste espérance de voir un peu mieux des astres, connus de toute antiquité, mais qu’on n’avait pu étudier jusque-là que d’une 1833 1839 De l’été 1833 jusqu’à l’automne 1839

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