Niépce correspondance et papiers
1212 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS sus de l’horizon, semble, il faut l’avouer, devoir apporter des difficultés de plus d’un genre dans les recherches photométriques qu’on voudra entreprendre avec le Daguerréotype. En général, on se montre peu disposé à admettre que le même instrument servira jamais à faire des portraits. Le problème renferme, en effet, deux conditions, en apparence, incon- ciliables. Pour que l’image naisse rapidement, c’est-à-dire pendant les quatre ou cinq minutes d’immobilité qu’on peut exiger et attendre d’une personne vivante, il faut que la figure soit en plein soleil ; mais en plein soleil, une vive lumière forcerait la personne la plus impassible à un clignotement continuel ; elle grimacerait ; toute l’habitude faciale se trouverait changée. Heureusement, M. Daguerre a reconnu, quant à l’iodure d’argent dont les plaques sont recouvertes, que les rayons qui traversent certains verres bleus, y produisent la presque totalité des effets photogéniques. En plaçant un de ces verres entre la personne qui pose et le soleil, on aura donc une image photogénique presque tout aussi vite que si le verre n’existait pas, et cependant, la lumière éclairante étant alors très douce, il n’y aura plus lieu 1 à grimace ou à clignotements trop répétés. Nous venons d’essayer de faire ressortir tout ce que la découverte de M. Daguerre offre d’intérêt, sous le quadruple rapport de la nouveauté, de l’utilité artistique, de la rapidité d’exécution et des res- sources précieuses que la science lui empruntera. Nous nous sommes efforcés de vous faire partager nos convictions, parce qu’elles sont vives et sincères, parce que nous avons tout examiné, tout étudié avec un scrupule religieux ; parce que s’il eût été possible de méconnaître l’importance du Daguerréotype et la place qu’il occupera dans l’estime des hommes, tous nos doutes auraient cessé en voyant l’empressement que les nations étrangères mettaient à se saisir d’une date erronée, d’un fait douteux, du plus léger pré- texte, pour soulever des questions de priorité, pour essayer d’ajouter le brillant fleuron que formeront tou- jours les procédés photographiques, à la couronne de découvertes dont chacune d’elles se pare. N’oublions pas de le proclamer, toute discussion sur ce point a cessé, moins encore en présence de titres d’antériorité authentiques, incontestables, sur lesquels MM. Niépce et Daguerre se sont appuyés, qu’à raison de l’in- croyable perfection que M. Daguerre a obtenue. S’il le fallait, nous ne serions pas embarrassé de produire ici des témoignages des hommes les plus éminents de l’Angleterre, de l’Allemagne, et devant lesquels palî- rait complètement ce qui a été dit chez nous de plus flatteur, touchant la découverte de notre compatriote. Cette découverte, la France l’a adoptée ; dès le premier moment elle s’est montrée fière de pouvoir en doter libéralement le monde entier (I). (I) Note : On s’est demandé si après avoir obtenu avec le Daguerréotype les plus admi- rables dégradations de teintes, on n’arrivera pas à lui faire produire les couleurs : à substi- tuer, en un mot, des tableaux aux sortes de gravures à l’ aqua-tinta qu’on engendre main- tenant 2 . Ce problème sera résolu, le jour où l’on aura découvert une seule et même substance que les rayons rouges coloreront en rouge, les rayons jaunes en jaune, les rayons bleus en bleu, etc. M. Niépce signalait déjà les effets de cette nature où, suivant moi, le phénomène des anneaux colorés jouait quelque rôle. Peut-être en était-il de même du rouge et du violet que Seebeck obtenait simultanément sur le chlorure d’argent, aux deux extrémités opposées du 1833 1839 1 De l’été 1833 jusqu’à l’automne 1839 1. On trouve « il n’y aura plus eu lieu » chez Daguerre. 2. Comparer cette description avec celle que Poncet donnait de l’héliographie en 1825 (v. 390).
RkJQdWJsaXNoZXIy NDY2MA==