Niépce correspondance et papiers
1222 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS encourager la fabrication ; et le ministre des Manufactures et du Commerce, C te de Sussy, avait pris un arrêté pour la répartition de ces primes, pendant les années 1813, 14, 15 & 16. Le 24 avril 1813, le préfet de Saône et Loire écrivait à MM. Niépce à Châlon s. S. [...] 1 Nous touchions alors (24 avril 1813) aux grandes convulsions politiques : l’orage grondait au loin et quelques mois plus tard tout était fini ! .. l’Empire Français avait dis- paru, englouti sous ses propres ruines ! .. La paix si longtems désirée, en rendant aux peuples la tranquillité, rétablit le libre commerce des mers. Le sucre, le café, l’indigo, le coton, et toutes les productions du nouveau monde, abondèrent en France ; la culture du pastel devenait superflue, elle fut abandonnée. On remarquera dans la réponse de mon père, du 29 avril 1813, au préfet de Saône & Loire, cette phrase — “dépuis cette époque (28. 9 bre . 1811) nous nous sommes livrés à des travaux d’une autre nature &c”. Effectivement, ces deux années, de 1811 à 1813, avaient été employées à faire construire à grands frais, une machine d’un énorme volume, dans laquelle mon père et mon oncle avaient pensé trouver une nouvelle force motrice, sans consommation ! Cette machine d’une extrème simplicité, mais d’un travail difficile, ne répondit pas à leur attente ; soit que les tubes en cuivre qui en formaient la partie essen- tielle, laissassent échapper le liquide qu’ils renfermaient, soit que l’expérience ne fût pas en rapport avec la théorie, cette machine fut mise de côté 2 . Nous voici arrivés au point où commencent les premiers travaux par lesquels mon père est successivement arrivé à completter sa découverte sur la photographie 3 . On com- prendra combien il dut être détourné de ses expériences, par les graves évenemens poli- tiques qu’ ( de ) 1813 jusqu’en 1815 ; par le séjour, ou plutôt la cohabitation des troupes alliées ; et par les dépenses énormes qui pesaient sur tout le monde, et principalement sur les propriétaires ! Aussi, ce ne fut guères qu’en 18156, qu’il put suivre avec fruit ses inté- ressantes recherches. C’est sur le nitrate d’argent que se fixèrent d’abord ses investiga- tions 4 . Le papier préparé, ou plutôt // recouvert d’une couche ( solution ) de nitrate d’ar- 1. Figurent ici la transcription de la lettre et de la réponse du 29 avril (v. 235, 236). 2. Aucun document concernant cette machine ne nous est parvenu. Selon toute logique, l’idée leur en était venue lors de leurs recherches sur l’hydrostatique (v. 210). La brève indication qui nous est donnée ici auto- rise à penser que les Niépce avaient opté pour un système que Bertrand Gille classe dans la seconde des cinq familles de dispositifs chronologiquement imaginés pour obtenir le mouvement perpétuel : « celle des roues à poids coulissants, roulants ou liquides » (v. 365n). 3. « Le travail de Monsieur du Hamel est presque terminé », écrivait Isidore à sa mère le 8 septembre 1839. On peut donc en conclure au moins qu’à cette époque l’académicien russe finissait de rassembler les pièces publiées dans les Dokumentii . Mais dans ces conditions, pourquoi attendit-il l’année 1850 pour les présen- ter à l’académie et faire savoir qu’il s’occupait de l’historique des faits (v. App. I) ? La présence du mot « pho- tographie » sous la plume d’Isidore incite à se demander si ces notes ne sont pas postérieures à 1839-1840 ; fragile hypothèse qui nous est suggérée par le fait que le substantif n’apparaît pas dans sa brochure de 1841. En effet seul l’adjectif « photographique » s’y trouve, faisant écho aux propos qu’Arago tint en 1839 (v. 629, 636). P.G. Harmant a consacré dans Photo Revue (avril 1976), ainsi que dans Camera (Lucerne ; jan- vier 1980) des articles abondamment référencés sur cette question.Arago n’eut pas besoin d’expliquer l’ad- jectif photographique pour se faire comprendre de son auditoire. Le mot photographie figurait dans cer- tains dictionnaires depuis plusieurs années ; dans un sens différent il est vrai. Dans le Dictionnaire général de la Langue française de François Raymond, paru en 1835, on en trouve la définition suivante : « Description de l’histoire naturelle qui traite de la lumière ». Il est vraisemblable que l’emploi du substantif dans son sens actuel, ait été inspiré par l’emploi préalable du qualificatif. 4. Nicéphore Niépce n’a jamais mentionné le nitrate d’argent mais le muriate d’argent c’est à dire le chlorure d’argent qui, contrairement au nitrate d’argent, correspond bien aux descriptions qu’il donne de ses expé- riences en 1816-1817.
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