Niépce correspondance et papiers
1302 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS Appendice à cette matrice une barre et une chandelle comme elles le sont à la matrice ancienne, après quoy elle a été remplie de millet blanc par le moyen de la trémie et on a trouvé que dans cet état au lieu de contenir moins de grains comme il étoit naturel de le présumer, eu égard au volume ou à l’espace que prennent la barre et la chandelle, cette mesure contenoit 95 mars 3 onces 6 deniers pesant, c’est à dire 2 marcs 3 onces ou 44 pouces et 4/31 e de pouce cube de plus que ne contient la même mesure sans barre ni chandelle. Ce fait bien constaté il ne sera pas moins curieux qu’il est utile pour nôtre objet de tacher d’en découvrir la cause. Voicy à peu près comme on peut l’expliquer. Lorsque l’on remplit une mesure avec un fluide, ses parties s’arrangent d’elles mêmes et vû l’uniformité de leur figure elles doivent toujours prendre la même situation entre’elles, c’est à dire, que la quantité du fluide contenu dans un vase est tou- jours proportionnelle à l’espace vuide que ces parties peuvent occuper ; mais il n’en est pas ainsy des grains ou de toute aggrégation de corps différents des molécules dont les liquides sont composés : les grains, soit du millet soit d’une autre graine quelconque, n’étant pas d’une figure symétrique ou uniforme leur manière de se combiner entre eux doit varier à l’infini, de cette combinaison dépendent les interstices qui doivent nécessairement exister entre des corps qui ne peuvent coïncider parfaitement les uns avec les autres ; et ce sont ces interstices plus petits ou plus grands qui rendent plus ou moins dense le volume total des grains contenus dans la mesure. Ce principe une fois établi, on verra en l’appliquant au phénomène qu’il s’agit d’ex- pliquer que tout se réduit à prouver que l’arrangement que prennent les grains lorsqu’ils tom- bent de la trémie dans une mesure absolument nue est différent de celui qu’ils prennent lors- qu’ils sont dérangés dans leurs chûtes par la rencontre de la barre et de la chandelle. Examinons présentement ce qui peut produire cette diversité d’arrangement et pourquoy dans le premier cas la mesure contient moins de grains que dans le second. On résoudra ce problème en observant dans l’un et l’autre cas la manière dont la mesure se remplit. Les grains en tom- bant de la trémie dans une mesure vuide et sans barre s’y amoncèlent en forme de cône, à mesure que ce cône tend à s’élever, le choc des grains qui arrivent brise le sommet qui venoit de se former, et le mouvement des grains ne consiste plus qu’à s’échapper du centre à la cir- conférence en se coulant le long de la surface inclinée du cône, mais ces grains n’ayant plus alors qu’une impulsion uniforme et foible ils ne sont pas contraints à se combiner entre eux de manière à ne laisser que les moindres interstices possibles, au lieu que lorsqu’ils tombent de la trémie sur une barre, ils sont réfléchis de tout les côtés où ils arrivent à peu près avec la même quantité de mouvement que s’ils tomboient immédiatement de la trémie sur chacun de ces endroits, par conséquent ils ont pour s’y combiner une force qui les contraint à mieux s’arran- ger, c’est à dire, à laisser entre’eux des interstices moindres et partant à former un volume total plus dense que dans le premier cas. La barre verticale appelée chandelle, placée au centre de la mesure, concourt encore à augmenter cet effet ; parce que les grains tendant à se placer dans une espèce d’équilibre, trouvent dans le centre de la mesure, où est leur plus grand mouvement, une résistance qui les refoule, pour ainsi dire, vers les autres endroits et par conséquent les y resserre davantage. Cette explication satisfait tellement au phénomène qu’on le verra dispa- roitre si dans les deux cas, lorsque la mesure a été remplie par le moyen de la trémie, on fait tas- ser le grain en secouant cette mesure sur le plancher. Il arrive pour lors que les grains se rap- prochent le plus qu’ils peuvent, c’est à dire, que leurs interstices diminuent et qu’il se fait un vuide dans le dessus de la mesure proportionné à l’état ou étoient les grains avant la secousse. Comme on a vû que dans le premier cas les grains devoient être moins serrés, il arrivera aussi que le vuide produit par la secousse y sera plus grand que dans le second ; mais que l’on rem- plisse ce vuide toujours en secouant la mesure jusqu’à ce qu’il ne se forme plus de vuide et
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