Niépce correspondance et papiers

N IEPCE 1391 App. XVII § 2. Retour de Napoléon. Béthune. Emprunté aux Mémoires inédits de Lamartine, ce témoignage 1 a doublement sa place ici 2 . XXIV Tout à coup [...] on entendit circuler un grand bruit sourd: L’empereur s’est évadé de l’île d’Elbe et marche, avec une poignée de soldats, à travers les montagnes, sur Grenoble 3 . Il y eut étonnement, mais nulle panique. Son abdication de Fontainebleau était trop récente. Le congrès des puissances à Vienne était encore assemblé, les armées de la coalition n’étaient pas licenciées, la France n’avait pas eu le temps de se dégoûter de la paix et des Bourbons. Bonaparte s’était trompé d’heure; personne ne l’attendait, personne ne le désirait; il venait hors de propos; il ne s’agissait pas de lui; son armée même n’y pensait plus ou n’y pensait pas encore. Ce fut le sentiment général [...] XXV [...] Mon premier sentiment avait été de repartir pour Paris, afin d’être prêt à me joindre à mes camarades; puis l’idée me vint que le roi allait dans doute nous réunir à Lyon, pour combattre l’empereur dans les gorges du Dauphiné, s’il persévérait dans sa marche, et je résolus d’attendre les ordres. Je restai, en conséquence, prêt à partir selon l’occurrence 4 . Point d’ordre. [...] Point d’ordre encore pour la maison du roi; il fallait enfin partir pour aller en chercher. Je montai à cheval avec le chevalier de Pierreclos 5 , et nous songeâmes à gagner la route du Bourbonnais par des chemins de traverse. A quelques lieues de Mâcon, nous rencontrâmes le colonel Duluat, un de nos amis, aide de camp du maréchal Suchet. Il nous aborda. « Eh bien! où est-il? nous dit-il. — A Lyon, et il va marcher sur Paris. — Sur Paris, réplique-t-il avec une ivresse qu’il ne cherche pas à retenir. Eh bien! Vive l’Empereur! » Et, rassemblant les rênes de son cheval, il partit au grand galop sur la route de Mâcon 6 . « Tu vois l’armée, dis-je à mon com- pagnon, elle part indécise, elle arrive enivrée comme Duluat. » Nous fîmes de tristes réflexions. « On ne lutte pas contre la popularité et la gloire, lui dis-je. Cette armée n’avait pas le droit de s’insurger contre son pays, contre la liberté, contre les serments, contre le peuple d’où elle sort; mais tu vois, ce qui se passe ici se passera partout 7 . Nous qui n’avons que l’honneur, suivons- le! » Et nous continuâmes au galop vers Paris [...] 1. Publ. in ALPH.L.2. 2. V.App.XVIII.Pour l’heure,Isidore et lui vivaient la même aventure.« En 1814,j’étais entré dans la maison mili- taire du roi Louis XVIII, comme tous les jeunes gens de mon âge dont les familles étaient attachées par sou- venir à l’ancienne monarchie. Je faisais partie du corps de cette garde qui devait marcher contre Bonaparte [...]» (ALPH.L.1). 3. On l’a vu, le destin de la famille Niepce et celui de Bonaparte s’étaient croisés plusieurs fois depuis 1789. Si l’on en croit la tradition familiale, c’est en mars 1815 qu’eut lieu la dernière rencontre entre Napoléon et Pierrette (v. App. VIII). Il faut retenir précisément la date du 14 mars puisque c’est ce jour-là que l’Empereur passa à Sennecey puis fit son entrée à Chalon, en milieu d’après-midi. En ce qui concerne les Cent Jours à Chalon, se reporter principalement au travail de Louis Gallas (L.G.22). 4. Lamartine était à Milly. 5. Adolphe, dont Lamartine fut un des amis les plus intimes. Marguerite, l’aînée de ses sœurs, deviendra la belle-mère d’Isidore (v. App. XVIII). 6. Révélateur du dilemme que connurent, pendant les Cent Jours, les officiers supérieurs qui devaient leur car- rière à Bonaparte, le cas du colonel David Niepce mérite d’être connu (v. App. XVI). 7. Lamartine a noté par ailleurs : « Je vis, à huit jours de distance, une France prête à se lever comme un seul homme contre Bonaparte, et une autre France prosternée aux pieds de Bonaparte » (ALPH.L.1).

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