Niépce correspondance et papiers

N IEPCE 1409 App. XIX savons aujourd’hui que les deux chercheurs, inconnus alors l’un de l’autre, celui-ci plus savant, celui-là plus artiste, devaient être associés plus tard dans le succès de l’entreprise et dans la gloire d’une récompense nationale; mais à travers ce premier crépuscule d’une idée singulière, qui donc pouvait entrevoir les heures du grand soleil ? Il est fou, disait-on, fou d’une folie qui va le perdre, lui et les siens! A cette pensée, quelles anxiétés et bientôt quels désespoirs autour de lui! Qu’il s’obstine dans sa poursuite, c’en est fait, non seulement de son modeste avoir, mais de sa raison, de sa santé, de sa vie peut-être. Ah! si une sérieuse autorité pouvait le sauver de lui-même! C’est alors qu’on fait appel à votre sagesse, et c’est alors aussi que commence pour vous un véritable supplice de conscience. Le cas est grave. Ramener à ses tableaux un artiste qu’une illusion égare, lui rendre le repos, lui rendre l’atmosphère et le foyer de la famille, assurément c’est œuvre pie; mais quoi! Si l’idée de l’inventeur n’est pas une chimère ? Si, dans ce grand laboratoire de magie qu’on appelle le monde, il a entrevu certaines choses dont personne ne se doute ? S’il suit pas à pas une trace demi-obscure, demi-lumineuse, qui a échappé à tous les regards? Enfin, dût-il ne pas toucher le but, s’il peut, chemin faisant, comme les vieux alchimistes, rencontrer ou provo- quer des phénomènes dont profitera la science ? Tout cela est possible; est-il permis de faire obs- tacle à ce qui est possible? Voilà un homme de foi; est-il permis de décourager sa foi? Non; après une délibération longue et poignante, ce fut là votre réponse, non, cela n’est pas permis. Quinze années s’écoulent, quinze années d’efforts, de luttes, de craintes et d’espérances, quinze années d’angoisses dont le contre-coup vous atteignait au cœur. Un jour enfin Daguerre (je crois, en vérité, que j’avais oublié de prononcer son nom, mais qu’importe, puisque chacun l’a dit ?), Daguerre vient à vous rayonnant, transporté; il tient à la main ses merveilleuses planches. La voilà donc, cette chimère! Et vous, Monsieur, avant de le féliciter, votre première pensée est un élan de reconnaissance envers Dieu qui vous avait inspiré cette confiance héroïque et l’avait si pleinement justifiée. C’était, dans toute la force de ce terme, un mouvement plein d’action de grâces à la fois pour Daguerre et pour vous. Un trait qui double le prix de ce sentiment si pur, c’est que Daguerre ne l’a jamais su. Je ne connais rien de plus humain ni de plus touchant. Quarante-huit ans ont passé depuis cet épisode 1 , c’était vers la fin de la Restauration. Vous étiez jeune alors, vous débutiez comme professeur aux cours de l’Athénée 2 , à côté de notre illustre confrère M. Mignet 3 [...] Pièce n° 3 Interprétation de Charles de Comberousse. Notice nécrologique sur Dumas 4 . A peu de chose près, Comberousse a cité exactement les deux premiers alinéas du dis- cours de 1864 (pièce n° 1). A signaler toutefois qu’il a remplacé « Il y a quarante ans » par « Il y a bien des années ». Pièce n° 4 Interprétation de Pasteur. Son allocution prononcée à la séance publique annuelle de la Société de Secours des Amis des Sciences, le 23 mai 1885 5 : 1. Ceci sous-entend : 1° que les faits remontaient à 1828, 2° que le daguerréotype avait vu le jour en 1843 ! 2. L’Athénée avait été fondé en 1784. Il était divisé en deux sections : celle des sciences et celle des lettres. 3. En 1828, Dumas ne « débutait » pas à l’Athénée mais y enseignait depuis cinq ans et pour l’avant-dernière année. Quant à l’historien Mignet (1796-1884), il n’y enseignait plus depuis quatre ans. Les deux hommes ne s’y étaient côtoyés qu’en 1823-1824. 4. Publ. in L.G.C. 1884. 5. Publ. in V. R., p. 382.

RkJQdWJsaXNoZXIy NDY2MA==