Niépce correspondance et papiers

1466 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS Appendice nous aussi affirmé que cette image ne pouvait être une héliographie au bitume. En 1992, notre redécouverte du physautotype, le procédé inventé par Niépce et Daguerre, nous ramena inévitablement à la table servie et changea radicalement notre vision des choses. Ce n’est que trois ans plus tard que nous avons pu authentifier formel- lement cette image (travaux publiés en 1999). B. LA POMME DE DISCORDE A PPROCHE DE DATATION . Dès mai 1890, on sut que le 2 du mois, six jours après le mariage de sa fille et à cette occasion, Eugène Niépce avait donné à la Société Française de Photographie « les deux der- nières épreuves qui viennent de mon grand-père, avant son association avec Daguerre 1 ». Au contraire il fallut attendre dix huit mois avant d’apprendre qu’il avait fait cadeau de la table servie dans les mêmes circonstances : « Monsieur Niepce m’en a fait don à l’occasion du mariage de sa fille », écrivit Davanne 2 . A quelle date exacte ? Avant ou après le 2 mai ? On l’ignore. Certes Davanne se rendit-il en personne à La Ferté-Bernard le 26 avril 1890 3 , mais il est quasiment certain qu’Eugène ne lui remit pas l’épreuve ce jour-là. « Je joins à l’épreuve, dans le même cadre, la lettre d’envoi de M. Niepce », devait ajouter Davanne en post-scriptum de sa lettre du 25 novembre 1891 4 . Cette question de date n’est pas sans importance. Revenons à la lettre du 2 mai 1890 et à cette précision : « avant son association avec Daguerre ». Généralement omise par les auteurs qui ont cité Eugène 5 , fort révélatrice pourtant, elle signifie qu’après ce don, Eugène ne disposera plus d’aucune image réalisée par Nicéphore seul, c’est-à-dire avant 1829. S’il donnait les toutes dernières images en sa possession, il ne prendrait pas la peine d’ajouter : « avant son association avec Daguerre ». Par conséquent, au moment où il écrit ces lignes, Eugène possède encore une ou plusieurs images réalisées par son grand-père, mais pendant l’association. Dès lors, on se trouve en présence d’une alternative : 1° soit Eugène n’a pas encore fait don de la table servie à Davanne et dans ce cas cette image fut effectivement réalisée pendant la collaboration avec Daguerre ; 2° soit il s’en est déjà séparé et nous ne pouvons conclure. Dans tous les cas, on est amené à se poser les questions suivantes : pourquoi Eugène Niépce ne donna-t-il à la Société Française de Photographie que des copies de gravures impropres à attester de l’invention de la photographie 6 , et non la table servie prise à la 1. B.S.F.P. 2 e s., t. 6 (1890), p. 148. Eugène ajouta en quoi celles-ci consistaient : « 1° Une des premières épreuves héliographiques obtenues par lui [Nicéphore] en 1824 et représentant le cardinal d’Amboise [...] 2° Une planche héliographique gravée par son procédé et par lui [la plaque d’étain représentant “le joueur”] ». Janine Niepce conserve une lettre inédite à en-tête de la S.F.P. datée du 15 mai 1890, par laquelle Davanne, signataire en tant que « président du Conseil d’administration de la Société Française de Photographie », remercie Eugène pour le don des « deux épreuves originales de Nicéphore Niepce » qu’il a fait à la Société. 2. Lettre du 25 novembre 1891 (B.S.F.P. 2 e s., 1891, p. 423). 3. Sa signature au bas de l’acte de mariage en témoigne. 4. Op. cit. p. 424. 5. Par exemple B. Lefebvre qui, sans en tenir compte et en supposant qu’Eugène Niépce fit simultanément ses dons à la Société Française de Photographie et à Davanne, a malheureusement conclu que puisqu’Eugène avait donné les dernières images de son grand-père en sa possession, la table servie ne pouvait pas être l’œuvre de Nicéphore. 6. A cette époque, la Société Française de Photographie détenait déjà d’autres plaques gravées par Nicéphore, semblables à celles données par Eugène.

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