Niépce correspondance et papiers
374 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS .Je viens de lire dans notre journal 1 une nouvelle adresse du sieur Tripet père, connu sous le nom de père Jacques 2 . Il demeure à Paris, rue Coquenard n° 21. Il est dit qu’en ache- tant quelques cornets de graines potageres et de fleurs, il donne gratuitement 6 pépins du giraumont* marbré surdoré*, et très sucré, dit de Damas ; mais je pense qu’en payant gras- sement ces pépins il ne refuserait pas de les vendre. Je se[rais] bien aise que tu puisses t’en procurer d’une manière ou de l’autre 3 . .Les expériences que j’ai faites jusqu’ici, me portent à croire que mon procédé 4 reus- sira bien quant à l’effet principal ; mais il faut parvenir à fixer la couleur 5 : c’est là ce qui m’occupe dans ce moment, et c’est cequ’il y a de plus difficile 6 . Sans cela la chose n’aurait aucun mérite, et il faudrait m’y prendre d’une autre maniere. .Nous avons fait redemander à Châlon, l’adrèsse de M r Fitz-William 7 , et on nous l’a donnée chez M.M. Perregaux, Lafitte et Comp ie banquiers rue du Mont-Blanc n° 9 8 . En t’adressant là, mon cher ami, tu es assuré de trouver M r Fitz-William ou du moins de savoir sa demeure, ce qui serait bien à desirer. // .Nous apprenons avec grand plaisir, que tu as trouvé grace à Dieu, la machine en bon état 9 . Peut être lorsque tu auras reçu ma lettre, que tu auras déjà pu la voir fonctionner. S’il lui arrive, comme c’est très probable, d’avoir encore des caprices, il faut lui administrer la mort-aux rats à forte dose 10 ; et je crois qu’en l’étudiant il ne sera pas impossible de décou- vrir la cause du mal. Adieu, Mon cher ami : reçois mille tendres embrassemens de la part de ma femme 11 et de la mienne ; embrasse bien aussi pour nous Isidore, si tu le vois, et fais lui part je te prie, de l’article de ma lettre qui le concerne. Ne nous oublie pas non plus si tu le veux auprès de ses frères 12 . ://: J.N. Niépce 1. L.Q. 89 p. 2. 2. Le père Tripet était « botanicien » (v. 287). 3. Nicéphore en tirait une fécule « de qualité supérieure » qui, semble-t-il, avait une vertu curative dans cer- tains cas d’« indisposition » (ibid.). 4. Dans cette lettre comme dans les suivantes, on remarque que Nicéphore écrit « mon procédé », ce qui pour- rait laisser entendre que Claude n’y est pour rien.Nous verrons pourtant que Claude a participé à l’élaboration de l’idée (v. 384), mais que la mise en pratique est du seul ressort de Nicéphore. 5. Le verbe « fixer » est employé pour la première fois par Nicéphore à propos de la stabilité de ses images. On sait qu’en photographie le fixage est le traitement nécessaire à la conservation de l’image. Il consiste à éli- miner le produit photosensible qui n’a pas reçu de lumière afin que l’image ne continue pas à se transfor- mer ensuite. On en voit ici la première évocation de l’histoire de la photographie. Sous la plume de Niépce, « couleur » désigne les différentes valeurs de la teinte de l’image ainsi que nous le verrons dans les lettres suivantes. Si Niépce eut à certains moments de ses recherches (v. 493) le rêve de capter les couleurs, il ne saurait en être question ici. 6. Nicéphore ne croit pas si bien dire.Le fixage sera le problème le plus ardu qu’il aura à résoudre et qui le tien- dra en échec pendant plusieurs années. 7. Le vicomte Fitz-William. Il avait passé tout le temps de l’Empire à Chalon (v. 323). Les Niépce entretinrent avec lui de bonnes relations. Quoiqu’apparement intéressé par le pyréolophore, il ne voulut pas « prendre part à l’exploitation du projet » (v. 324). 8. Alphonse-Claude-Charles Perregaux (1744-1808), banquier sous la Révolution, régent de la Banque de France en 1800, et Jacques Laffitte (1767-1844) son associé. Ce dernier, fils d’un charpentier de Bayonne, arrivé jeune à Paris, était entré chez Perregaux comme commis. 9. La machine en « petit modèle ». Etait-ce le prototype de 1806 (v. 182) ? S’agissait-il d’un modèle construit postérieurement ? Nous ne pouvons le dire. 10. Justement afin de lui éviter de prendre un rat*. 11. Agnès était alors âgée d’au moins 52 ans (v. 111n). 12. Antoine et Victor. 1815 1824 1 8 De la seconde Restauration jusqu’à la naissance de la photographie
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