Niépce correspondance et papiers

382 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS compte de Babet et de Bourgeon 1 . Ceque la grande intimité qui régnait entre eux devait faire prévoir, est arrivé ; et les sages conseils dictés par l’intérêt, qu’ils ont été dans le cas de rece- voir d’assez mauvaise grace, n’ont abouti à rien. Babet, de son propre aveu, est grosse de quatre mois. Si elle l’eut avoué plus tôt, son honneur se serait trouvé à couvert, et elle aurait évité un nouveau sujet de scandale pour la maison. Cette conduite plus répréhensible de la part d’une fille de son âge, donne lieu à bien des propos, et nous fait la plus grande peine. C’est hier soir seulement qu’elle a cru devoir nous faire cette étrange confidence qui n’en était plus une pour les personnes qui la voyaient. // Nous lui avons répondu avec ce ton de modération et de bonté qui de la part de ma femme surtout, contrastait singulièrement avec celui qu’on se permettait de prendre trop souvent à son égard. Babet aura été dans le cas de comparer et de juger en même tems que cequ’on lui disait était pour son propre avantage comme pour celui de la maison. Leur intention est de se marier et je crois, de se mettre ensuite dans leur ménage ; mais ils nous ont demandé de rester ici jusqu’à la S t . Jean, et nous y avons consenti d’avance, mon cher ami, bien persuadés que tu souscrirais volontiers à cet arrangement. D’après les données que nous pouvons recueillir, je pense que le dénouement de cette longue intrigue n’est pas cequi pouvait nous arriver de plus malheureux : rendons- en grace à la providence ; car la pauvre barque allait de mal en pis. .Nous sommes enchantés de savoir que la machine fonctionne maintenant à mer- veille 2 ; mais c’est bien moins sans doute, au changement de lycopode 3 que tu dois cette amélioration, qu’aux perfectionnemens que tu as imaginés. Reçois donc à ce sujet, mon cher ami, nos félicitations et nos remercimens les plus empressés et les plus sinceres. Nous regrettons beaucoup, je te l’avoue, de ne pouvoir te les exprimer de vive voix, et d’être pri- vés du plaisir te participer à la juste satisfaction que tu dois éprouver. Peut-être que d’heu- reuses circonstances dont tes succès nous font mieux que jamais pressentir la possibilité, nous permettront aussi de faire le grand voyage : Dieu le veuille ! Maintenant que tu as atteint le but désiré qui était de donner l’idée la plus avantageuse de notre découverte, il ne s’agit plus, je crois, que de s’occuper des moyens [les] plus propres à en tirer tout le parti possible, tu te rapelles ce dont nous étions convenus à cet égard, mon cher ami 4 ; mais tu te trouves peut-être, par ta position, dans le cas d’envisager les choses sous un autre point de vue. Nous serions donc bien aises qu’après un mûr examen et des renseignemens obte- nus par voie indirecte, si tu crains de te mettre trop en avant, tu pusses nous mander cequi te paraitrait le plus convenable eu égard aux circonstances. // .Je comptais faire hier l’expérience dont je t’ai parlé ; j’ai cassé mon objectif dont le foyer était le mieux assorti aux dimensions de l’appareil. J’en ai bien un autre, mais qui n’a pas le même foyer ; cequi nécessitera quelques petits changemens dont je vais m’occuper. 1. Ou Bourjon (v. 252). S’agissait-il de l’ancien fermier des Niépce (v. 160), était-il l’un de ses parents, tous deux ne faisaient-ils qu’une seule et même personne avec Antoine Bourgeon, ne sachant signer, qui habitait Saint-Loup-de-Varennes en 1789 (v. 32) ? Rappelons qu’en 1808, Nicéphore était en relation avec une per- sonne du même nom, demeurant à Mellecey (v. 213). Babet et Bourjon étaient aux gages des Niépce (v. 257) ; nous ne savons à quel titre en ce qui concerne Bourjon. Babet pouvait être cuisinière (ibid.). 2. Le lecteur constatera au fil des lettres qu’il ne faut pas prendre ce type d’information au pied de la lettre. En fait, en déclarant avec enthousiasme que ses expériences réussissaient à merveille, Claude, flattant la pas- sion de la recherche qui animait son frère, obtenait par avance son adhésion à la nécessité de nouvelles améliorations et donc de nouvelles dépenses. 3. V. 173n. 4. « Tâcher de nous défaire de notre modèle après l’avoir préalablement montré aux princes et même au Roi » (v. 247). 1815 1824 1 8 De la seconde Restauration jusqu’à la naissance de la photographie

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