Niépce correspondance et papiers
390 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS Les voilà mariés depuis hier : je souhaite de tout mon cœur qu’ils soient heureux, et qu’ils veillent avec un peu plus de soin à leurs intérèts qu’ils n’ont veillé aux nôtres ; mais ce n’est pas là l’embarras./. On doit rendre réponse demain ou samedi pour ta paille : si on en offre un prix convenable nous la vendrons ainsi que tu le désires/. Tu ferais peutêtre bien, mon cher ami, de voir ma cousine ou son homme d’affaire pour constater et lui faire reconnaître notre créance car M me Niépce 1 ayant beaucoup de dettes, nous pourrions nous trouver com- promis si nous négligions de prendre toutes les précautions nécessaires. Tu ne // ferais peut être pas mal, pour agir plus sûrement et plus comodément pour toi, de charger de cette opération assez importante un avocat ou un notaire de Paris ( M r . Barat 2 par exemple que nous avons déja employé, et qui est peut être parent de ton hôte. ) ./. Je viens de construire une autre chambre obscure qui tient le milieu entre la petite 3 et la grande 4 , et j’ai employé à cet effet, une lentille de notre ancien mycroscope 5 , qui est fort bonne et qui va très bien. Je pourrai de cette maniere comparer mes expériences et en faire au moins deux à la fois, cequi sera très avantageux. J’ai oublié de te dire dans ma derniere lettre, qu’il n’est pas nécessaire pour opérer, que le soleil luise ; et que le mouvement de cet astre n’oc- casionne aucun changement dans la position de l’image 6 : du moins je ne m’en suis point apperçu, et j’aurais dû le remarquer./. Le fameux Dubois 7 vient d’être arrêté à Châlon./. Il 1. Il pourrait être question d’Adélaïde, la veuve de Claude Charles Niepce, cousin germain de Nicéphore que nous avons déjà évoqué (v. 187), lequel était mort en septembre 1813 (v. App. VII § 7). 2. Il s’agit de Louis Victor Barat qui, à la suite de Peaulejeune, tint la charge de Maître Raymond Bertrand- Taillet, du 4 janvier 1811 au 8 avril 1817 (étude LIII du minutier central des notaires parisiens). Maître Barat était installé au 339 rue Saint-Honoré.La précision donnée ici par Nicéphore fut le point de départ de toutes nos découvertes relatives à Maillard, Labène et Claudine Niépce. C’est effectivement en consultant à rebours les répertoires de Maître Barat, que nous avons fini par découvrir, sous le numéro d’ordre 229, à la date du 28 mars 1812 (v. 229), le nom de Niépce. 3. Le baguier. 4. Celle de six pouces. 5. Il semble être question ici d’un autre appareil que du microscope du grand-père Barault (v. 247), mais nous ne pouvons l’affirmer. 6. On se serait attendu à ce que Niépce parle des ombres diverses, occasionnées par le mouvement du soleil plutôt que de la position de l’image qui n’a pas lieu de bouger. 7. Louis Henri Dubois (né en 1760) était avoué à Chalon.« Sous l’Empire,son rôle ne semble pas avoir été de pre- mier plan; [...] il fut vénérable de la loge maçonnique, c’est à ce titre qu’il prit une part active au mouvement fédératif. Cette action lui valut d’être inquiété après la seconde Restauration [...]. Il mena ensuite une vie reti- rée et mourut à son domicile, rue Basse-de-l’Obélisque, le 24 novembre 1824 » (L.G.22 t. 3). Voici en quels termes il s’était trouvé porté sur la liste des prévenus politiques, fin 1815 : « Ancien révolutionnaire, prêtre marié, accusé d’avoir chez lui des réunions secrètes et d’être le principal moteur des menées qui ont lieu dans le département pour propager la maxime révolutionnaire et abreuver les esprits en répandant de fausses nou- velles et en cherchant à discréditer le Roi et son auguste famille.Enfin accusé par la clameur publique comme perturbateur de tout ordre social » (A.D.S.L. série M, police générale, 1815). Quant à la Fédération, reportons- nous encore à Louis Gallas: « A la fin d’avril 1815, une proclamation de la Fédération bretonne était tombée entre les mains de la population chalonnaise [...]. On apprit que la Fédération bourguignonne était en cours de formation à Dijon et que des statuts venaient d’être élaborés (il furent approuvés le 7 mai).D’après l’article III, l’objet de cette confédération était “de consacrer tous les moyens à la propagation des principes libéraux, d’opposer la vérité à l’imposture, de répandre la lumière au milieu des hommes égarés, de soutenir l’esprit public au niveau des circonstances présentes, de s’opposer à tous les désordres, de maintenir dans l’intérieur du pays la sûreté publique, d’employer tout ce qu’on peut avoir d’influence et de crédit pour faire rester cha- cun dans la ligne de ses devoirs envers le Prince et envers la Patrie, de porter un secours effectif et prompt à la première réquisition de l’autorité publique partout où besoin sera, de secourir les villes, bourgs et villages menacés; de déjouer tous les complots tramés contre la liberté, nos constitutions et l’Empereur; enfin de se prêter mutuellement assistance et protection,selon les cas et les événemens”[...].Le programme était vaste et la Fédération ouvrait ses rangs à tous ceux qui voulaient prêter leur appui au gouvernement impérial et lutter contre le gouvernement légitimiste.L’idée avait d’ailleurs germé aussi à Chalon.Le 10 mai,deux délégués cha- 1815 1824 1 8 De la seconde Restauration jusqu’à la naissance de la photographie
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