Niépce correspondance et papiers

46 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS nombre de cent pour mettre le hola. Tout est fort tranquille aujourd’hui. L’intendant de Bourgogne est venu hier, [a] fait la visite des greniers. Nous lui avons donné à dîner et lui nous a donné à souper. Il m’a engagé à l’accompagner jusqu’à Verdun 2 , qui est à trois lieues d’ici. Nous y avons été à che- val, afin de revenir pour souper. Nous avons trouvé à Verdun 30.000 mesures de blé. La mesure pèse 40 et se vend communément 6 livres 10 sols. Je ne sais pas combien de temps nous y serons encore. J’espère toutefois que ce ne sera pas long. Le moment des Etats approche. Tout s’en ressent. La fermentation est des plus grandes partout dans les villes, les bourgs, les campagnes. Fasse le ciel que cette étincelle de patriotisme soit durable et que ce ne soit pas pour détériorer les choses ! Je le crains. Vous savez qu’avant de mourir l’on se porte toujours mieux. Fesch 3 ne m’écrit pas. Pourquoi cela ? J’ai interrompu ma lettre par [suite d’]une visi- te que j’ai reçue de mon hôte 4 , qui est un bon avocat 5 , très riche, qui m’a invité à faire la Pâque avec lui. J’aimerais cependant mieux manger le ravioli ou les lasagnes à Ajaccio. Dans ce pays-ci, il n’y a pas de noblesse. Ils n’ont jamais eu de garnison, en sorte qu’ils ont la plus grande considération pour le militaire. Nous ne sommes que deux officiers. Portez-vous bien. Aimez-moi toujours. Donnez-moi des nouvelles de Corse et ne vous inquiétez pas trop de l’avenir. Je répète ce que mon père disait : « Les dents nous manque- ront avant la fortune » [...]. Adressez vos lettres à Auxonne. Il est probable que ma première lettre vous annoncera des nouvelles intéressantes. L’air de ce pays est bon et me fait le plus grand bien. 34 Lettre 6 Seurre, printemps 1789. Napoléon Bonaparte à son frère Joseph. Seurre, mai 1789. [...] 7 Je suis à Seurre depuis le 1 er avril avec un détachement de cent hommes, pour apaiser une petite révolte 8 . Les bords de la Saône sont enchantés et ce pays-ci surtout est superbe. La saison est belle. Il ne manque rien pour ma santé. Mon ami, si mon cœur était susceptible d’amour, quel moment favorable, fêté partout, Léopold Niepce), « Madame Prieur, femme d’une rare énergie et d’une grande distinction, résida à Seurre jusqu’à la Révolution. Son salon était le rendez-vous de la meilleure compagnie : Buffon, Guyton de Morveau, Denon, M. de Montigny le célèbre financier de Dijon. Les événements politiques y amenèrent aussi vers 1788 [en réalité 1789], un homme devenu bien grand dans l’Histoire : Napoléon » (E.N.). Pour plus de détails, se reporter à l’article que nous consacrons à ce sujet (v. App. VIII). 1. A.D.C.O. Procès-verbal de l’émeute du 31 mars reçu Decamp, notaire à Seurre. 2. Verdun-sur-le-Doubs,au confluent du Doubs et de la Saône,est à mi-chemin environ entre Chalon et Seurre. 3. Archevêque de Lyon en 1802,cardinal en 1803.Oncle maternel de Bonaparte,Joseph Fesch avait alors vingt-six ans. 4. M. Lambert. A cet égard, signalons l’ambiguïté des propos de Victor Fouque, qui peuvent laisser penser que Bonaparte et ses camarades officiers logèrent chez Pierrette Niepce (V.F. p. 278). 5. M. Lambert était procureur. 6. Publ. in HAUT. 7. Haut de la lettre déchiré (note de M. d’Hauterive). 8. V. App. VIII B § 6. 1761 1792 Du règne de Louis XV jusqu’à la chute de la monarchie

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