Niépce correspondance et papiers

54 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS ment honorée de votre confiance, dès les premiers temps de son établissement. Ce fut en 1624 que vous commîtes à ses soins le dépôt précieux de nos plus chères espérances, l’édu- cation de la jeunesse. Nous osons le dire, Messieurs, elle a mis toute sa gloire à remplir ces engagements sacrés, et dans ses fonctions, aussi pénibles qu’honorables, le zèle et le désin- téressement la caractérisèrent toujours. Servir la patrie, voilà notre unique ambition ; l’avoir servie, voilà la récompense la plus digne de nos cœurs. Est-il un moment, Messieurs, où nous puissions jouir plus complètement de ce noble salaire ? En effet, pourquoi notre âme ne s’ouvrirait-elle pas à la plus délicieuse des satis- factions, celle de penser que ces lumières qui vous distinguèrent toujours et qui vont faire le bonheur de tous, vous les devez en partie à cette société d’hommes libres, qui, par un retour bien légitime, s’enorgueillissent de votre propre gloire ? Libre par son essence, notre congrégation n’est esclave que de la loi, parce que la loi y fut toujours la volonté de tous. C’est dans cet heureux esclavage qu’elle fait consister sa douce liberté. Là, dit le grand Bossuet en parlant de l’Oratoire, une sainte liberté fait un saint engagement ; on obéit sans dépendre, on gouverne sans commander ; toute l’autorité est dans la douceur, et le respect s’entretient sans le secours de la crainte. C’est que, Messieurs, l’égalité politique est la base de nos principes constitutifs. Ainsi, chez nous, l’esprit de corps ne peut être que l’esprit national. Quels titres, Messieurs, que les nôtres ? En existerait-il de plus capables de justifier la confiance qui nous anime en votre présence ? Aussi l’hommage respectueux que nous avons l’honneur de présenter à votre illustre assemblée, est-il un hommage pur, vrai, sin- cère, le plus cordialement civique ; hommage que nous n’hésitons pas de nommer homma- ge de famille, puisque depuis près de deux siècles, s’il m’est permis de m’exprimer ainsi, nous sommes enfants de la nouvelle Constitution 1 . [Discours du P. Pocholle, professeur d’éloquence au collège de l’Oratoire] Messieurs, Vous venez d’entendre l’hommage d’une congrégation accoutumée depuis longtemps à regarder la liberté comme l’essence de l’homme. Si ses travaux ont été pour la société de quelque avantage, peut-être ne le doit-elle qu’à cette noble prérogative. Elle pourrait l’offrir comme le garant de son utilité dans la Constitution nouvelle. Mais ne craignez point que nous osions poser une question qu’il appartient au souverain seul de peser dans toute sa sagesse. Nous faisons plus, Messieurs ; quel que soit notre sort, tant que notre titre de citoyens et notre amour pour la patrie nous resteront, nous ne nous croirons privés de rien. On peut donc enfin le prononcer, ce mot si longtemps profané ou méconnu ! Oui, nous avons une patrie, puisque nous avons des lois et que nous formons des mœurs. Les droits de l’homme sont consacrés ; la majesté du peuple est avouée ; les préjugés antiso- ciaux se dissipent ; l’opinion publique s’affermit ; la législation s’épure ; la nation voit ses municipalités, ses départements, ses tribunaux se remplir d’hommes de son choix. La reli- gion revient à sa simplicité primitive. A tant de bienfaits, bientôt il n’en restera plus qu’un à ajouter, celui d’une éducation qui, pour me servir d’expressions qui ne sont point nou- velles pour nous, « recueille tous les talents, fasse éclore toutes les vertus, et mette la 1. On ne pouvait mieux exprimer combien les oratoriens, chauds partisans des événements de 1789, s’étaient effectivement comptés, de longtemps, parmi les instigateurs des idées nouvelles. 1761 1792 Du règne de Louis XV jusqu’à la chute de la monarchie

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