Niépce correspondance et papiers

68 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS 54 Lettre (A.N. M 228 B , n° 37) 1 . Inédit Chalon-sur-Saône, été 1791. La » persécution » du R.P. Latour. A M. Wuillet, procureur général de l’Oratoire, rue St Honoré à Paris 2 C’est, Monsieur, pour votre satisfaction particulière que l’on s’est déterminé à vous donner des détails sur la persécution des trois ecclésiastiques de Châlons. On les a refusés à des personnes qui en voulaient faire un usage public ; on y a vu des sujets de crainte pour la tranquillité de ces mêmes ecclésiastiques. Il est même à propos de vous observer que M. Journet ci-devant maire de Châlons 3 , et principal promoteur de cette affaire est aujourd’hui membre du corps législatif. Le P. F. Lature 4 , supérieur de la maison de l’Oratoire et du séminaire de Châlons et vicaire général du diocèse avait encouru la haine des personnes prévenues contre le clergé par la confiance dont l’honorait Mgr. Duchilleau, son évêque 5 . Ce prélat, contraint de fuir pour se soustraire à différentes procédures criminelles intentées contre lui, à l’occasion de ses instructions sur les troubles de l’Eglise, ne cessait de faire entendre sa voix du fond de sa retraite 6 ; et le retour fréquent de ses écrits répandus avec profusion ne pouvait man- quer d’échauffer la bile du parti philosophique contre les coopérateurs de son ministère. On saisit avec chaleur l’évènement du 21 juin 1791 7 . Sous prétexte d’en rechercher les complices, la municipalité de Châlons se livra à des perquisitions domiciliaires. Le supé- rieur de l’Oratoire endura cette épreuve dans la nuit du 22 sans qu’elle pût fournir le motif du plus léger soupçon contre lui ; mais celle faite dans l’évêché avait été plus favorable au 1. Magnifique document avec cachet. Une copie, effectuée dans le courant du XIX e siècle (d’après sa calligra- phie), se trouve aux Archives de l’Oratoire, dans le carton Chalon-sur-Saône. 2. Siège de la communauté de l’Oratoire. A ne pas confondre avec l’Institution, le noviciat de la congrégation, qui se trouvait rue d’Enfer (v. 14n). 3. Journet avait été « proclamé » maire de Chalon le 3 février 1790 (A.M.C. 1D1/1 f° 28). 4. Le R.P. François Latour (v. 12n). 5. Jean-Baptiste Du Chilleau (1735-1824). Dernier évêque de Chalon-sur-Saône, sacré le 30 décembre 1781. Auparavant il avait été appelé à la cour comme aumônier de la reine de Marie Leszezynska (1764), puis de Marie-Antoinette. Il deviendra archevêque de Tours en 1817 (D.B.F.). Le 7 avril 1789, ayant appris qu’il irait représenter le bailliage de Chalon aux Etats Généraux, Claude Bernard Navier avait déploré l’élection de « l’évêque courtisan » (E.S.R.). Monseigneur Du Chilleau témoigna « toujours beaucoup de bienveillance » aux Niépce qui s’en flattaient (v. 265). Ce que ne précise pas l’auteur de cette lettre, c’est qu’ayant refusé de prêter serment à la constitution civile du clergé, le R.P. Latour s’était rendu coupable au regard de la muni- cipalité. A ce sujet, une anecdote rapportée par l’abbé Bauzon prouve que le supérieur de l’Oratoire savait se montrer retors. Le 3 mars 1791, en la maison commune, « M. Latour ayant demandé l’entrée, s’est pré- senté et a dit qu’il connaît le décret de l’Assemblée nationale qui interdit aux ecclésiastiques la liberté de faire des prédications, lorsque lesdits ecclésiastiques ont cru devoir s’abstenir de prêter le serment exigé des fonctionnaires ecclésiastiques ; que ni lui ni les prêtres de sa maison ne sont disposés à prêter serment et que c’est pour cette raison qu’il a fait enlever la chaire qui, portative, se place et se déplace à volonté » (L.M.F.B. p. 416). 6. « Ayant repoussé avec fermeté la constitution civile du clergé, il s’était adressé à ses diocésains par une “Lettre pastorale sur le schisme” (1790), bientôt suivie d’une autre accompagnée d’un “Avertissement sur l’élection des évêques constitutionnels d’Autun et de Dijon”(1791). Prévenu que la populace devait assaillir sa voiture et le jeter dans la Saône,il fit face courageusement,sortit à pied et traversa la foule sans que celle- ci osât lever la main sur lui. Il quitta une première fois la France, mais y revint pour publier une dernière “Lettre pastorale” (1791), avant de se réfugier à Fribourg en Suisse » (B.U.). 7. La fuite du roi et son arrestation à Varennes, le 22 juin. 1761 1792 Du règne de Louis XV jusqu’à la chute de la monarchie

RkJQdWJsaXNoZXIy NDY2MA==