Niépce correspondance et papiers

N IEPCE 717 leur avons données jusqu’ici, viennent de nous prévenir qu’il serait possible qu’ils eussent besoin de leurs fonds à l’échéance de nos effets ; qu’ils ne pourraient alors consentir à un renouvellement, et qu’ils exigeraient le remboursement intégral des 41,560 francs que nous leur devons maintenant, compris les 6,000 francs de la dernière lettre de crédit. Je ne chercherai point à aggraver notre position, mon cher ami, par le détail des funestes conséquences qui résulteraient pour nous tous et pour moi en particulier, d’une pareille chose si elle arrivait. Comment trouver à emprunter lorsque tous nos biens sont grêvés d’inscriptions, et que nous allons être dans le cas de renouveller un de nos emprunts de Lyon ? Nos dettes s’élèvent déjà à plus de cent-milles francs ; et si par malheur on venait à nous exproprier, toute notre fortune y passerait. Il ne faut plus nous faire illusion, mon cher ami, l’alternative où nous sommes aujourd’hui doit nous déssiller les yeux et nous déterminer enfin à prendre un parti. L’échéance de nos effets arrive le 31 décembre pro- chain ; ce qui fera encore deux mois et demi lorsque tu recevras ma lettre. Si tu n’avais que des probabilités de succès à l’égard de tes deux découvertes 1 , tu penserais sans doute comme moi, que ceque nous aurions de mieux à faire dans la circonstance présente, serait de nous en tenir là, et de nous hâter de vendre pour nous libérer 2 ; mais dans ta précé- dente réponse du 3. 7 bre . tu nous dis, mon cher ami, // que quant au mouvement de va-et- vient, le succès en est assuré, et qu’ainsi nous devons être bien tranquilles. Comme cette premiere machine est d’une exécution beaucoup moins difficile que l’autre, et d’ailleurs très-avancée ; nous te conjurons donc, mon cher ami, vu notre position critique, d’em- ployer pour l’achever, les deux mois et demi dont tu peux encore disposer jusqu’à l’échéan- ce. Je t’y sollicite personnellement avec d’autant plus d’instance, que je pressents toute l’étendue de la difficulté que tu as à surmonter, et qu’il est à craindre que les résistances n’absorbent l’excédent de force sur lequel tu parais compter 3 . Si ton attente se trouve enco- re trompée, je te le demande en grâce, ne va pas plus avant pour le moment. Ton esprit fatigué reprendra de nouvelles forces en se portant sur un autre objet ; et l’heureux succès qui doit le couronner, te permettra du moins de reprendre avec plus de zèle et de satisfac- tion, le travail dont tu t’occupes. Plut à Dieu q[ue tu] t’y fusses déterminé plus tôt ! Quand on est malheureusement entre les mains de ses créanc[iers, il] n’y a pas à badiner : tu vois donc, mon cher ami, qu’il y a ici force majeure ; ainsi tu peux [te] prévaloir de ma lettre ; car on ne peut rien opposer à des raisons aussi péremptoires que celles dont nous nous appuyons et que nous soumetons à ton jugement avec confiance, bien persuadés qu’après les avoir pesées dans ta sagesse, tu prendras la détermination la plus propre à nous rassu- rer sur le danger de notre position actuelle. Il n’est que trop réel, mon cher ami ; et le calme que j’affecte ne doit pas te faire illusion sur ceque j’éprouve, sur ceque nous éprouvons tous de pénible dans ce moment. Puisse ta prochaine lettre nous apprendre, ou que tu es heureusement parvenu à résoudre la derniere difficulté que tu avais à surmonter, ou que tu t’es enfin décidé à terminer ton mouvement de va-et-vient ! 4 En attendant, reçois, mon 1. Relatives, d’une part au mouvement alternatif, d’autre part au mouvement circulaire. 2. A posteriori, cette suggestion apparaît comme doublement sensée. Après la mort de Claude, quelque cinq années plus tard, la vente des seuls domaines de Colombey et d’Allériot rapportera plus de 123.000 francs. Mais à cette époque, les données du problème se trouveront amplement modifiées. 3. « Un volant parfaitement équilibré, tournant dans le vide sans aucun frottement, conserverait son énergie sous forme cinétique et ne s’arrêterait jamais de tourner. Mais cette rotation perpétuelle est irréalisable en pratique : les frottements existent, si faibles soient-ils,et l’énergie cinétique du volant se dissipera peu à peu en chaleur équivalente. Il faudra donc un apport d’énergie extérieur pour maintenir la rotation » (Q.). 4. A ces injonctions pathétiques, la réponse de Claude ne sera rien moins que rassurante (v. 387). 386 1824 1829

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