Niépce correspondance et papiers

720 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS laquelle tu payes les interets, se charger de cette créance 1 ; car sil plait à Dieu tes travaux et les miens nous mettront bien dans le cas de nous liquider envers nos creanciers et je pense que nous devons employer touts nos moyens pour prevenir ; la vente dune partie de nos biens ◊ tachons sil est possible déviter aux envieux et aux jaloux cette occasion de rire à nos depends. Tu es parvenu mon cher ami à avoir plus de confiance que jamais dans la resource que doivent toffrir tes penibles et ingenieux, travaux il est bon d’en faire un motif de credit, et de le faire pressentir pour les miens 2 , jai lespoir fondé et assuré pour la pre- mière machine, et je regarde de même la seconde et quoique depuis ma derniere lettre ; jaie fait plusieurs essais nouveaux, qui ne m’ont donné encore un resultat definitif ; cependant j’elague toujours des difficultés qui s’y opposeraient si je les avais pas deja prevuës. Je suis bien reconnaissan[t] mon cher ami de la confiance que tu veux bien accorder à ma discre- tion sur l’emploi des moyens à ma disposition, c’est à dire sil conviendrait mieux d’abban- donner ; l’appareil circulaire pour celui de va-et-vient qui est effectivement bien avancé ; mais qui cependant je le prevois ne pourrait pas être fini dici à la // fin de decembre ; tan- dis que jai lespoir que celui qui m’occupe actuellement et qui merite la plus grande reflec- tion et des essais sans fin, vu les difficultés qu’il oppose, et qui ne sont pas insurmontables ; cependant on les appercoit bien mieux en ne perdant pas de vuë son objet, je crois donc mon cher ami que le meilleur parti à prendre le plus conforme à notre interet commun et 3 de suivre sans relache mes travaux actuels, parceque l’appareil est actuellement presque achevé, la seule chose essentielle est deviter la reaction et jai l’espoir d’[y] parvenir ◊ une seule bonne inspiration et l’affaire est dans [le] sac et l’avantage d’une telle decouverte et dune aussi gr[ande] force meritent bien toute mon application et tous nos efforts. J’espere que Dieu les benira ainsi que les tiens mon cher ami. et que nous nous saurons gré l’un et lautre de les avoir entrepris, et d’y avoir été zèlés et constants ; redoublons donc de coura- ge plutôt que de nous effrayer des difficultés, qu’un sort ennemi semble nous opposer sans cesse ; nous y trouverons la recompense à tant de privations de peines, et de soins, dont nous aurons lieu je l’espere de nous feliciter, c’etait le seul moyen en notre pouvoir de repa- rer les pertes de notre fortune nous avons été bien avises de nous en servir. Avec la perse- verance nous verrons que nous aurons pris le meilleur parti ! 4 Recois mon cher ami de nouveau l’assurance du plus tendre et du plus sincere atta- chement tant pour toi que pour ma chere sœur et mon cher neveu. Mes respects et com- plimens à tous nos parents et amis. Le bonjour à tous nos gens et mes caresses accoutu- mées aux fideles gardiens. France A Monsieur Monsieur Niepce Ruë de l’Oratoire 1824 1829 Des débuts de la photographie jusqu’à l’association avec Daguerre 1. On imagine l’effet que produisit cette réponse sur Nicéphore, lui qui, miné par l’inquiétude, venait de sup- plier Claude de regarder la réalité en face (v. 386). 2. On peut se demander si Nicéphore perçut l’aveu d’impuissance que dissimulent ces propos. 3. Pour est. 4. Ces lignes nous frappent moins par l’obstination dont elles témoignent que par leur ton, qui ne souffre aucune réplique. On y perçoit l’ascendant que « Monsieur Niépce aîné » exerçait sur sa famille. La « pleine confiance » de Nicéphore aidant (v.384),on comprend un peu mieux que pareille situation ait pu durer trois ans encore.

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