Niépce correspondance et papiers

756 C ORRESPONDANCE ET PAPIERS gravées trop faiblement. La planche représentant la Ste famille est assez bien venue sous le rapport des contours et de la pureté des tailles ; mais on aurait de la peine à en obtenir une épreuve qui, je suis assuré, ne viendrait que par places ; les petits accidens et le sablé occa- sionnés par la fragilité du vernis viendraient plutôt que la gravure. Des deux paysages celui qui est gravé par accident 1 a seulement un ciel qui offre une teinte, qui paraîtrait être le résultat de la gravure à l’aquatinta* ; si elle n’était ( pleine de taches et d’un ) sablé inégal, les devants qui devraient être assez vigoureux ne donneraient aucun résultat à l’impres- sion. L’autre est généralement gravé, mais bien faiblement, trop faiblement et trop égale- ment, la partie des devants sous la masse d’arbres, au lieu d’être la plus vigoureuse de la gravure, serait après le ciel la plus faible 2 . Les deux portraits sont les meilleurs essais que vous ayez faits, mais que de travail vous avez encore à faire si vous voulez atteindre à la perfection ! Celui des deux portraits qui est le mieux gravé, c’est à dire le plus profondé- ment, donnerait à l’impression l’épreuve d’une planche usée par un fort tirage. Toutes les tailles sont bien marquées, surtout celles des dernières teintes du camail* et de la toque qui sont d’un résultat satisfaisant 3 , mais celles des ombres sont tout à fait confondues pas assez creuses et toutes arrondies ; vous avez dû vous en appercevoir surtout dans les teintes du fond où les tailles sont tout à fait arrondies, elles devraient au contraire être de vive arrête, plus la gravure est de vive arrête, plus elle est belle et pure, et ( elle ) donne ( alors ) de bonnes épreuves, la tête est assez bien, mais pleine d’un petit sablé qui existe dans les parties claires de toutes vos planches. J’aurais désiré faire faire seulement une ou deux épreuves de quelques unes vos planches afin d’être plus certain de la justesse de mon opinion, mais j’ai crain de commettre une indiscrétion en le faisant sans y être autorisé par vous. J’aurais désiré pouvoir vous envoyer de bonnes planches gravées ; celles que je grave ne me restent pas, ou elles me servent continuellement. Cependant il me reste une prépa- ration à l’eau forte d’une vue sur les ( tours de ) cathédrale de Paris que j’ai faite étant plus jeune, comme étude, le travail n’en est pas tout à fait mauvais et la morsure en est assez belle. Elle est à votre disposition. Je suis fâché que vous n’ayez pas persisté à faire vos essais sur cuivre je crains que sur étain vous n’ayez toujours des tailles rondes et quand même vous obtiendriez une belle gra- vure elle s’arrondirait et // s’userait facilement après un petit nombre d’épreuves ; ce métal est trop mou pour supporter longtems le frottement des serpillères, linges et de la main pas- sée sur le blanc dont on se sert pour essuyer les planches. On ne se sert guère de planches d’étain que pour graver la musique et les dessins d’étoffes que l’on grave profondément et que l’on essaie trés légèrement à l’impression. Je crains bien aussi que lorsque vous réussiriez à rendre fidèlement tous les traits d’une gravure vous ne puissiez jamais arriver aux différentes teintes et aux finesses qui caractéri- sent après le dessin une bonne estampe ; car comment puis-je croire qu’avec le secours d’un acide, vous obteniez ce que nous avons de la peine à avoir avec le secours d’un bon vernis, de différens acides, différentes morsures et du travail de plusieurs burins variés dans leur forme (sans le secours de l’eau-forte) joints à la force ou à la légéreté de la main selon que les teintes doivent être vigoureuses ou faibles. Je vous ( prie ) d’excuser cette observation 1824 1829 Des débuts de la photographie jusqu’à l’association avec Daguerre 1. Par à-coups, irrégulièrement. 2. Un « paysage » avec « ciel » et « devants sous la masse d’arbres », il pourrait s’agir de la plaque d’étain gravée conservée au Musée Niépce sous la dénomination : « Paysage d’après Claude Le Lorrain ». 3. Ces données : un « portrait », celui d’un personnage portant « camail » et « toque », autorisent à affirmer que ces héliogravures représentaient le cardinal d’Amboise (v. 402n et ill. p. 752).

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