Niépce correspondance et papiers
N IEPCE 977 a dégouter, à éloigner les acquéreurs. Nous en avons été pour 2,000 francs environ, tant pour frais accessoires que pour le sacrifice d’une année de revenu de l’auberge, que la rési- liation du bail rendait indispensable. De nouvelles affiches furent faites pour la vente en gros qui n’eut pas un meilleur resultat : il aurait fallu vendre tout le domaine compris notre habitation, ce à quoi nous ne pouvions consentir. Maintenant il faut attendre, et je ne sais combien de temps ; mais si le haut prix actuel des vins donne un peu plus de valeur aux propriétés de vignobles, nous espérons pouvoir nous défaire moins desavantageusement de Jambles, et nous commencerons alors par là 1 . Nous avons encore dans nos caves une par- tie des dernieres récoltes ; cequi est très-heureux, car celle de cette année se réduira à fort peu de chose, et sera probablement de bien mauvaise qualité 2 . Nous avons ici peu de fro- ment et de seigle, mais abondance d’orge, d’avoine, surtout de fêves, et tout annonce, Dieu merci, qu’il en sera de même des autres tremois*. S’il n’y a pas eu beaucoup de foin, les champs de blé, après la moisson, ont offert un supplément auquel on ne s’attendait pas, et qui arrive fort à propos. Ainsi, tout // bien considéré, l’année sera plus productive pour le fermier, qu’on ne le croyait il y a 5 ou 6 mois. .Je pense, cher cousin qu’Alexandre n’aura pas fait le voyage projetté à Paris ; car dans ce cas, vous m’eussiez demandé la lettre de recommandation qu’il désirait avoir 3 . Au reste je n’ai pas oublié de le recommander d’avance à M r . Daguerre qui est venu passer ici une quinzaine de jours dans le courant de juin. Nous avons, pendant cette moitié de mois, tra- vaillé sans relâche du matin au soir ; mais, quoique nous ayons fait d’importantes amélio- rations à mes procédés 4 , nous n’avons pas encore obtenu, sous le rapport essentiel de la promptitude, un résultat qui nous permette de nous servir utilement de la chambre noire que M r . Daguerre m’a apportée 5 . C’est la derniere et la plus grande difficulté que nous ayons à vaincre ; aussi nous en occupons-nous exclusivement car, après la solution, le reste n’est plus qu’un jeu. Nous nous comuni[quons] réciproquement nos recherches à ce sujet, et il m’annonce pour sa prochaine lettre des détails interessans que je suis empressé de conn[aitre]. Aussitôt que nous en serons à pouvoir prendre des points de vue, je ne man- querai pas cher cousin, de vous en donner avis ; mais jusqu’à présent je ne présume pas que ce soit aussi promptement que je le désirerais 6 . Cequ’il y a de bien certain c’est que 1. Nous l’avons dit, Jambles sera vendu le 14 février 1842 pour 40.000 francs (v. 470n). 2. « La tension politique qui caractérise ces années 1830-1832 est encore accentuée par des difficultés écono- miques . C’est d’abord le vignoble qui manifeste. La révolution de Juillet avait réveillé l’espoir d’une abolition des droits sur les boissons, et beaucoup de redevables avaient immédiatement cessé de les payer. L’annonce de la reprise des recensements des vins provoque des troubles graves à Beaune en sep- tembre 1830 ; en novembre - l’atmosphère est certainement assombrie par des vendanges catastro- phiques -, les employés des contributions indirectes, menacés, doivent quitter Meursault [...]. Ce n’est qu’à la fin de 1831 et en 1832 qu’une situation normale peut être rétablie » (P.L. p. 490). 3. V. 520. 4. Au travers de la correspondance, nous comprenons que ces améliorations concernent la réalisation de couches blanches de résines diverses (v. 525) et l’augmentation de la sensibilité (v. 527) jugée toutefois encore insuffisante par Daguerre. 5. On a vu que Daguerre avait reconnu qu’en se servant de la chambre noire, ils perdaient beaucoup de temps , et pensait qu’ils n’en auraient besoin que quand ils seraient parvenus au grand degré de vitesse et du blanc (v. 523). 6. P.G. Harmant notait à ce propos : « Il est fort improbable qu’il y ait là une arrière pensée de vente de l’in- vention et un début de propagande publicitaire… comme certains auteurs l’ont suggéré » (T.P. p. 14). Nous partageons sans hésiter cet avis. Le propos de Nicéphore n’a d’ailleurs rien d’obscur. Vouant à son cousin, son créancier de toujours, beaucoup de gratitude, il se faisait un devoir de l’informer de l’évolution de ses travaux. 526 1830 1833
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