Niépce correspondance et papiers

N IEPCE XIII Le 28 février 1766, sans avoir été défendu, le chevalier de La Barre sera condamné à avoir la langue coupée et à être brûlé vif. Il en appellera au Parlement qui, le 5 juin, confirmera la sentence mais lui accordera d’être décapité avant d’être livré aux flammes. Le 1 er juillet, portant sur le dos cet écriteau : « Impie, blasphémateur, et sacrilège abominable et exécrable », il sera traîné devant le porche de l’église Saint-Wulfran d’Abbeville pour y faire amende honorable et avoir la langue coupée. Il sera ensuite déca- pité sur la place du grand marché puis son corps sera brûlé en même temps que le Dictionnaire philoso- phique, au grand affolement de son auteur. Touché directement, et en dépit des conseils de prudence que lui prodigueront Diderot et son ami Grimm, Voltaire ne cessera de réclamer la révision de l’affaire et redoublera ses coups contre le fanatisme, notamment en s’en prenant à la langue « bonne à griller » du conseiller au Parlement Pasquier dont on dira qu’il a chargé contre les philosophes, instigateurs de sacrilèges. Finalement La Barre sera réhabilité par la Convention le 16 novembre 1793. Non moins foudroyantes, les répliques de Voltaire à l’adresse des ennemis des philosophes dans la bataille encyclopédique, contribuèrent largement à la victoire de Diderot. Il avait accablé le publi- ciste Fréron dans sa satire du Pauvre diable (1758), l’avait mis en scène sous le nom de Frélon dans sa comédie de L’Ecossaise (1760). A la fin de l’année 1765, les volumes du texte VIII à XVII (et dernier) de l’ Encyclopédie sont ter- minés ; ils seront distribués clandestinement aux souscripteurs au début de 1766. Dès la parution du volume I du texte, en 1751, l’entreprise avait été attaquée à la fois par les jésuites et les jansénistes, par Fréron, agent de la reine, et par le parti dévot. Grâce à la protection de Madame de Pompadour et surtout grâce à la politique éclairée de Malesherbes, directeur de la librai- rie, on vit paraître les volumes III à VII de 1753 à 1757. En 1758, l’année où d’Alembert, écœuré par les polémiques, se retira, le livre fut condamné au bûcher. En 1759, le parti dévot obtint la révoca- tion du privilège accordé au dictionnaire, l’interdiction de vendre les volumes parus, la condamna- tion des libraires à rembourser les souscripteurs. Malesherbes sauva une nouvelle fois l’entreprise en admettant le remboursement des souscrip- teurs sous la forme de volumes de planches. Tandis que se poursuivit clandestinement l’impression des dix volumes de texte restant à publier, la guerre des pamphlets fit rage sans interruption. Infatigable, combattant sur tous les fronts, associant l’opinion à ses luttes, Voltaire harcela les adver- saires de Diderot dont la tâche fut en définitive facilitée par l’expulsion des jésuites. Quant aux onze volumes de planches, ils parurent sans encombre entre 1762 et 1772. Inconsidérément, faute de documents antérieurs à 1800, l’Histoire a laissé s’imposer avec Niépce une figure du plein XIX e siècle. Préjudiciable à la connaissance, à la compréhension et partant à l’intérêt des choses, cette distorsion a largement contribué a affadir son image. Enraciner l’être, ses aspirations et son œuvre dans l’époque qui convient, c’est commencer à raviver le souvenir d’un « homme au génie profond ».

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